Transport en banlieue: "Kadjamor" réussit le test à Keur Massar.



« Kadjamor ». C’est le nom que les Keur-massarois ont donné à ces taxis banlieue ou taxis tatamis en circulation depuis 2015 dans la localité. Coqueluche des usagers pour son confort et sa rapidité, les « kadjamor » ont, sans remplacer les taxis clandos, créé une nouvelle donne dans le milieu du transport à Keur Massar.

Il est 18 heures. A une cinquantaine de mètres de la grande station de Keur Massar, sur la route qui mène vers Malika, un décorsaisit la curiosité des passants non-habitués des lieux : deux longues files d’attente. Avec le brouhaha des voitures, despassants et des marchands, on voit tout d’un coup arriver une « kadjamor », une voiture pas comme les autres. Elle renvoie à celle qu’on a l’habitude de voir dans les films indous, un peu moins grande qu’une camionnette avec que des places assises et une bâche à la couleur de la voiture qui recouvre celle-ci.

Pas loin, un homme, la trentaine révolue, la mine un peu fatiguée appelle :« où sont ceux qui vont à Malika ? Montez par ici ». C’est le contrôleur. Une partie des gens qui faisaient la queue monte et le reste attend. A l’intérieur de la « Kadjamor », il y a six sièges à l’arrière et un devant en plus de celui du chauffeur. Ce dernier est aussi le receveur. « Moi je préfère les « kadjamor » parce que c’est plus confortable et c’est plus rapide » nous confie unusager trouvé dans la file d’attente, soixantenaire habillé en boubou blanc. Ce dernier malgré son âge avancé, suit la queue apparemment longue et attend la prochaine voiture qu’il ne va surement pas prendre. Pas loin de lui, un  autre, jeune, soutient « même si le prix du trajet est un peu cher par rapport aux supers, je prends toujours ces taxis TATA parce qu’une fois l’attente finie, en un temps trois mouvements tu es chez toi ». En effet, dans les supers ou cars rapide, moyen de transport très prisé dans la banlieue, les passagers payent 100 francs pour aller à Malika alors que dans les « kadjamor » c’est 150 francs. « Une différence pas méchante si on sait que les supers de même que les bus trainent sur le chemin et sont pour la plupart surchargés» nous dit un habitué de ces taxis banlieue.

Ces voitures qui travaillent de 06h 00 à 22h 00ne vont pas seulement à Malika. Il y’en a qui vont à Mtoa, d’autres qui vont au croisement Keur Massar et d’autres qui vont à Jaxaay. Toutefois tous les taxis banlieue ne sont pas des « Kadjamor ». « Kadjamor ». Le mot est flanqué en gras sur le capot de toutes les voitures qui existent en différentes couleurs mais d’une forme identique. Ce n’est pas la fusion des prénoms Kadja et Mor comme le penseraient les romantiques. Le mot en question est du diola et signifie entente. C’estaussi le nom du GIE qui a été le premier à les mettre en circulation à Keur Massar. Même s’il y a un autre GIE (regroupement des GIE de Keur Massar) qui gère d’autres lignes et qui n’ont pas « kadjamor» écrit sur leurs voitures, les usagers n’en font pas le distinguo. Toutes c’est voitures sont des kadjamor ou « allo Bombay », la deuxième appellation revoient à leur origine indoue.

« Beaucoup pensaient que ces voitures ne réussiraientpas la phase test vu leur apparence fragile »

Du côté de la direction du GIE Kadjamor affilié à l’AFTU, on se félicite des performances de ces taxis banlieue et espère étendre le champ d’action. En effet Abdallah Dramé, trésorier du regroupement nous confie « ces voitures, c’était un projet du président Abdoulaye Wade. Il voulait changer les taxis communément appelés « clandos »  par ces taxis banlieue et créer un regroupement des chauffeurs comme c’est le cas avec les bus TATA. Mais la plupart de ces chauffeurs ne voulaient pas s’engager pace qu’ils disaient que ces voitures étaient trop chères et fragiles». Selon Abdallah Dramé, le concessionnaire ne donnait pas les voitures comme prêt mais les vendait au montant de six millions de francs.C’est au moment où ce dernier a voulu abandonner le projet que son groupe est intervenu. «Lorsque les choses ont commencé à trainer, le concessionnaire TATA Unitech voulait retirer le projet. C’est là que nous nous sommes présentés avec l’aide d’une banque spécialisée dans le transport et nous avons pris les voitures. Nous devions verser un apport à la banque et l’Etat devait nous subventionner 650.000 francs. En 2015 lorsque le conseil exécutif des transports urbains de Dakar (CETUD) nous donnait 11 voitures des 20 disponibles, il nous a notifié que ces voitures faisaient partie du projet train express régional. (Ndlr : les 9 autres sont données à un autre GIE de Rufisque). Mais comme le train n’est pas encore livré, nous allons faire une phase test pour voir si ça va marcher. Et Dieu merci, depuis 25 mois que nous les avons mis en circulation, nous sommes passés de 11 à 29 taxis ». De l’avis de ce dernier, même si les choses semblent bien marcher, il leur arrive de rencontrer quelques difficultés.« Beaucoup pensaient que ces voitures ne réussiraient pas la phase test vu leur apparence fragile. Mais maintenant, ils voient bien qu’elles peuvent même dépasser les courtes distances qui leur sont assignées. Pas longtemps nous avons eu à céder une partie du trafic à un autre GIE, celui du regroupement des GIE de Keur Massar.Et pourtant, il n’en voulait pas au début. Il nous arrive aussi que les chauffeurs des supers nous interdisent le stationnement pour prendre nos clients ou qu’ils nous disent de garer juste trois voitures parce qu’ils disent que nous prenons leurs clients.  Mais nous, à chaque fois nous prônons la médiation parce que nous n’avons pas encore de gare » fustige-t-il.

Face à cet état de fait, le trésorier du GIE Kadjamor lance un appel aux autorités compétentes de leur aménager un espace de travail mais aussi un garage pour les réparations car, le délai de garantie dépassé, c’est toujours le concessionnaire qui s’en charge et les pièces coûtent chères. Mais en attendant la réalisation de ces doléances, Keur Massar vit au rythme de Bombay ou Bhopal avec ces « kadjamor » qui gagnent de plus en plus de terrains.

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